Newsletter 01/13

Arthur Chaskalson, ancien Chief Justice d’Afrique du Sud (1931-2012)

Arthur Chaskalson, décédé le 1er décembre 2012, fut l’un des plus grands juristes des cinquante dernières années.

Il demeure une référence internationale

Il alliait à une très grande culture juridique un engagement des plus efficace pour les droits fondamentaux.

Avocat à Johannesburg, il fit partie de l’équipe des défenseurs de Nelson Mandela au procès Rivonia du début des années 1960.

En 1979, il créait le Legal Resources Centre dont l’action se poursuit en faveur des personnes privées de leurs droits économiques et sociaux.

Il participa aux négociations de la nouvelle constitution et fut nommé en 1994, Président de la Cour Constitutionnelle qui venait d’être créée et qu’il présida jusqu’à sa retraite en 2005.

Sa visite en France en 1998 fut remarquée.

Il ouvrit et présida, le 12 juin 1998 à Marseille, la conférence organisée par le Comité Français pour l’Afrique du Sud.

Lors de cette visite, il éclaira le public français sur les mécanismes protecteurs mis en place par la nouvelle constitution qui doivent rester un exemple et être pleinement préservés.

Les travaux du Comité Français pour l’Afrique du Sud auprès de Nations Unies :

I - Sur l’élimination et la prévention de toute forme de violence contre les femmes

Extraits du document établi par le Comité Français pour l’Afrique du Sud pour la 57ème session de la Commission sur le statut de femmes des Nations Unies.

Les violences faites aux femmes et aux filles constituent un fléau qui transcende les pays, les ethnies, les cultures, les classes sociales et les classes d'âge. Les chiffres sont préoccupants. Suivant les pays, de 15 à 71 % des femmes ont été victimes de violences au cours de leur vie. Aucune femme, aucune fille dans le monde n'est à l'abri de subir des violences en raison de son sexe.

Le Comité français pour l’Afrique du Sud tient à apporter ici sa contribution en proposant des pistes concrètes :

1. Renforcer les actions de sensibilisation et de prévention

- mettre en place des campagnes de sensibilisation destinées aux hommes qui n’ont souvent pas conscience de la gravité de leurs actes

L’association EngenderHealth a mis en place le programme Men as Partners (MAP) qui comprend des ateliers à destination des hommes dans des endroits tels que lieux de travail, syndicats, prisons ou institutions religieuses.

Après avoir participé à ces réunions, une majorité rejette les violences contre les femmes. Les adolescents sont plus enclins à changer leur point de vue que les hommes plus âgés.

- Éloigner le conjoint violent de manière à protéger les femmes et leurs enfants.

L’Afrique du Sud pourrait s’inspirer d’un procédé expérimenté en France, selon lequel un "téléphone d'urgence" est attribué aux personnes mises sous protection par une mesure d'éloignement du conjoint violent, permettant d'avertir directement un service d'urgence, lequel connaît immédiatement la situation de la personne qui appelle grâce à l'identification du numéro et peut envoyer des services de police dans les meilleurs délais.

En France également, selon un récent décret, désormais, toute femme en situation de danger pourra bénéficier sans délai de mesures de protection indépendamment ou en amont du dépôt de plainte. Ce dispositif d'urgence permet également l'organisation de la vie quotidienne de la victime comme l’attribution du logement ou l’exercice de l'autorité parentale.

- Aider les victimes à ne pas reproduire les violences dont elles ont été victimes

L'Organisation Mondiale de la Santé, dans un texte présenté le 21 septembre 2010 à la Conférence mondiale de la prévention des traumatismes et de la promotion de la sécurité, a souligné pour la première fois qu'un des principaux facteurs de risque de subir et de commettre des violences domestiques et sexuelles est d'avoir soi-même subi des violences dans l'enfance. 42% des personnes ayant vu leur mère être violentée ont déclaré avoir usé de violence physique contre une partenaire au cours des 10 dernières années et 9% ont signalé en avoir usée dans l’année en cours.

Or des traitements contre ces traumas existent et sont efficaces. Des soins spécialisés doivent être développés. Une obligation de soins doit également être enjointe aux personnes reconnues coupables de violences.

- Prévenir des risques de contamination au VIH/ SIDA

Outre la contamination directe, il est démontré que les femmes qui ont été victimes d’abus sexuels dans leur enfance peuvent, à l’adolescence ou à l’âge adulte, avoir un comportement sexuel plus à risque, augmentant encore le risque d’infection du VIH.

Aussi, des actions doivent être menées sur le modèle de celles mises en place par l’association Nisaa avec ses maisons-refuges et ses programmes de sensibilisation, de prévention et de soins du VIH/SIDA, aussi bien à l’attention des mères que des enfants.

- Communiquer en direction des femmes handicapées

En Namibie, pays voisin de l’Afrique du Sud, la Fédération internationale pour le planning familial, bénéficiaire du Fonds d’affectation spéciale des Nations unies, a créé un programme de sensibilisation ciblant les femmes et les filles handicapées. Suite à ces formations, l’accès des femmes handicapées aux services de protection a augmenté.

Des outils spécifiques destinés aux femmes handicapées, tels que des brochures de sensibilisation en braille, doivent être développés.

2. Améliorer la prise en charge des victimes

- Faciliter le signalement des violences par la mise en place d’un numéro unique et gratuit

De nombreuses associations et services étatiques disposent d'un numéro de téléphone à l'attention des victimes. Toutefois, la mise en place nationale d'un numéro de téléphone unique et gratuit qui serait largement diffusé au travers de campagnes médiatiques permettrait qu'il soit connu de tous et plus facilement accessible pour les victimes. Des interlocuteurs spécialement formés orienteraient au mieux les victimes après avoir recueilli leurs récits.

- Former des policiers à recevoir les plaintes des victimes

Un accent particulier doit être mis sur la notion de viol conjugal, souvent assimilé à un litige entre époux. La violence domestique est, elle aussi, trop souvent considérée par la police comme une infraction d'ordre privé. Elle n’est pas assez prise au sérieux, sa gravité est sous-estimée, et le recueil des preuves est rarement satisfaisant.

L'objectif serait que, dans chaque commissariat, un policier – de préférence une femme – soit formé dans ce domaine, et désigné pour recevoir les plaintes.

- Accroître le nombre de foyers sûrs pour les femmes victimes de violences et leurs enfants

L'Afrique du Sud a accru le nombre de places disponibles dans des centres d'accueil d'urgence pour femmes battues. Cependant, ce chiffre est encore insuffisant et ces centres sont pour la plupart implantés dans les villes, créant ainsi un vide pour les femmes non-citadines. L’objectif fixé par les Nations unies d’une place en foyer pour 7500 habitants doit être atteint dans les meilleurs délais et un effort doit être réalisé pour créer des foyers en milieu rural.

3. - Garantir l’effectivité de leurs droits aux victimes

De grands progrès ont été réalisés au niveau des lois et des politiques pour lutter contre les violences faites aux femmes. Pas moins de 125 des 193 pays membres des Nations unies interdisent aujourd'hui la violence conjugale. L’Afrique du Sud dispose aujourd’hui, depuis 2007 (Criminal Sexual Offenses Act) d’un dispositif des plus complet pour lutter contre ce fléau.

C’est au niveau de l’application des textes que des progrès doivent aujourd’hui être réalisés partout dans le monde.

Selon le Conseil de l’Europe, les taux de condamnation pour viol sont en baisse quasiment partout en Europe alors que les dénonciations ont augmenté.

En Afrique du Sud, comme en France, de récentes affaires ont laissé entendre qu'un viol pouvait être commis en toute impunité. De surcroît, aujourd’hui encore, de nombreuses personnes responsable du meurtre d’une femme ne sont pas jugées ou ne font l’objet d’aucune condamnation.

La justice doit condamner sévèrement les responsables de tels actes dans un esprit d’exemplarité.

Une formation particulière doit être mise en place à l’attention des magistrats, afin de leur faire connaître les textes applicables.

II – La lutte contre la pauvreté dans les régions rurales éloignées des grands centres urbains

Document établi par le Comité Français pour l’Afrique du Sud pour la session de février 2013 de la commission pour le développement social du conseil économique et social (ECOSOC) des Nations Unies.

La lutte contre la pauvreté s’inscrit dans un contexte de déséquilibre démographique croissant entre d’une part de grandes concentrations urbaines, comportant des quartiers déshérités de plus en plus importants, et d’autre part des zones rurales, souvent délaissées et de moins en moins peuplées.

Le gigantisme des pôles urbains, sur tous les continents, regroupant fréquemment plusieurs millions de personnes, suscite d’immenses défis sociaux, économiques et environnementaux, de plus en plus difficiles à résoudre en matière de conditions de logement, d’éducation, d’accès aux soins, d’équipement sanitaires et de fourniture d’eau potable.

Les objectifs d’un développement durable ne peuvent être atteints si le choix d’un modèle de croissance fondé sur les très grandes métropoles urbaines devient exclusif.

La réflexion doit être engagée pour réhabiliter les régions éloignées des grands centres urbains et ainsi donner de nouvelles chances au développement durable sur l’ensemble des territoires.

Des équilibres nouveaux sont à rechercher à partir d’actions multiples portant notamment sur :

1- La régulation du marché de vente des terres arables afin de préserver l’agriculture familiale ou communautaire et la poursuite de la lutte contre la désertification des sols.
2- Le développement de l’agriculture familiale en encourageant les petites et moyennes exploitations en particulier par des prêts sans intérêts ou à intérêts bonifiés
3- La mise en place dans toutes les zones rurales déshéritées de Centres locaux de formation aux techniques modernes de l’agriculture.
4- L’aide aux petites et moyennes entreprises artisanales et commerciales avec lesquelles les exploitations familiales sont en relation.